Coupe du monde 2018 : la vitrine et la fête
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Coupe du monde 2018 : la vitrine et la fête
Editorial du « Monde ». Vladimir Poutine se veut bon camarade. La Coupe du monde de football, qu’il accueille à partir du jeudi 14 juin sur ses terres, « c’est la possibilité pour beaucoup d’individus de comprendre d’autres cultures, de se faire de nouveaux amis », a-t-il résumé, la veille de l’ouverture de la compétition. Le propos lénifiant ne trompe personne : ce n’est pas pour se faire de nouveaux amis que le président russe a tout fait, il y a huit ans, pour obtenir l’organisation de cette compétition, mais pour soigner l’image de son pays et afficher sa puissance, en dépit des efforts occidentaux pour la contenir.
Vladimir Poutine est pourtant bien placé pour savoir que la diplomatie du sport peut se retourner contre ceux qui cherchent à l’utiliser. Ce fut le cas en Argentine, où la Coupe du monde 1978 avait mis en lumière les exactions du régime de Jorge Videla. De même, les Jeux olympiques de 1988 avaient contraint la Corée du Sud à assouplir son régime militaire. Quant à l’organisation des Jeux olympiques d’hiver de Sotchi, en 2014, elle a jeté une lumière crue sur le fonctionnement clanique du pouvoir russe et ses lois liberticides. L’obsession de terminer en haut du tableau des médailles avait alors incité Moscou à pousser si loin son système de dopage organisé que le Comité international olympique a fini par mettre la Russie au ban du sport mondial.
Mais la soif de prestige international de Vladimir Poutine est irrépressible. Il n’est pas le seul. Les moyens mis en œuvre en marge du congrès de la FIFA, en 2010, qui devait attribuer les tournois de 2018 et 2022, disent tout l’enjeu : espionnage par les services secrets, contrats économiques opportuns, pressions amicales des chefs d’Etat sur leurs ressortissants ayant le pouvoir d’attribuer la Coupe du monde. Ainsi de Nicolas Sarkozy, alors président, soufflant à l’oreille de Michel Platini de porter sa voix sur le Qatar plutôt que sur les Etats-Unis. Ou de Christian Wulff, le président allemand, recommandant à Franz Beckenbauer de voter pour la Russie.
La Coupe du monde de football est devenue trop puissante pour ne pas être politique, et le changement du mode de scrutin, qui donne une voix à toutes les fédérations plutôt que de concentrer le pouvoir dans quelques mains influençables, n’y change rien : ainsi, la répartition, mercredi 13 juin, des votes pour la Coupe 2026 est quasiment calquée sur les réseaux diplomatiques des pays candidats. Elle a donc, fort logiquement, été attribuée au trio nord-américain (Etats-Unis, Mexique, Canada) plutôt qu’au Maroc, Donald Trump ayant quasiment menacé de fermer le robinet de l’aide américaine aux pays qui ne feraient pas le bon choix.
Durant quatre ans, la Coupe du monde est donc affaire de tout, sauf de football. Arrive toutefois un moment où l’on fait place au jeu. Nous y sommes. Pour le plus grand bonheur de ces quelque 4 milliards de (télé) spectateurs qui, en dépit de l’indifférence ou de l’accablement des autres, suivront la compétition – soit la moitié de l’humanité. Partout dans le monde, de Paris à Pékin, des bidonvilles de Lagos aux favelas de Rio, on se travestira en Messi, en Ronaldo ou en Neymar. C’est la passion pour le football qui attise les guerres d’influence afin d’obtenir l’organisation du Mondial. C’est la même passion qui en fixe les limites : le 15 juillet, la Coupe du monde ne sera plus celle de Vladimir Poutine, mais celle des artistes du ballon rond, les acteurs de cette fête mondialisée.
Vladimir Poutine est pourtant bien placé pour savoir que la diplomatie du sport peut se retourner contre ceux qui cherchent à l’utiliser. Ce fut le cas en Argentine, où la Coupe du monde 1978 avait mis en lumière les exactions du régime de Jorge Videla. De même, les Jeux olympiques de 1988 avaient contraint la Corée du Sud à assouplir son régime militaire. Quant à l’organisation des Jeux olympiques d’hiver de Sotchi, en 2014, elle a jeté une lumière crue sur le fonctionnement clanique du pouvoir russe et ses lois liberticides. L’obsession de terminer en haut du tableau des médailles avait alors incité Moscou à pousser si loin son système de dopage organisé que le Comité international olympique a fini par mettre la Russie au ban du sport mondial.
Mais la soif de prestige international de Vladimir Poutine est irrépressible. Il n’est pas le seul. Les moyens mis en œuvre en marge du congrès de la FIFA, en 2010, qui devait attribuer les tournois de 2018 et 2022, disent tout l’enjeu : espionnage par les services secrets, contrats économiques opportuns, pressions amicales des chefs d’Etat sur leurs ressortissants ayant le pouvoir d’attribuer la Coupe du monde. Ainsi de Nicolas Sarkozy, alors président, soufflant à l’oreille de Michel Platini de porter sa voix sur le Qatar plutôt que sur les Etats-Unis. Ou de Christian Wulff, le président allemand, recommandant à Franz Beckenbauer de voter pour la Russie.
La Coupe du monde de football est devenue trop puissante pour ne pas être politique, et le changement du mode de scrutin, qui donne une voix à toutes les fédérations plutôt que de concentrer le pouvoir dans quelques mains influençables, n’y change rien : ainsi, la répartition, mercredi 13 juin, des votes pour la Coupe 2026 est quasiment calquée sur les réseaux diplomatiques des pays candidats. Elle a donc, fort logiquement, été attribuée au trio nord-américain (Etats-Unis, Mexique, Canada) plutôt qu’au Maroc, Donald Trump ayant quasiment menacé de fermer le robinet de l’aide américaine aux pays qui ne feraient pas le bon choix.
Durant quatre ans, la Coupe du monde est donc affaire de tout, sauf de football. Arrive toutefois un moment où l’on fait place au jeu. Nous y sommes. Pour le plus grand bonheur de ces quelque 4 milliards de (télé) spectateurs qui, en dépit de l’indifférence ou de l’accablement des autres, suivront la compétition – soit la moitié de l’humanité. Partout dans le monde, de Paris à Pékin, des bidonvilles de Lagos aux favelas de Rio, on se travestira en Messi, en Ronaldo ou en Neymar. C’est la passion pour le football qui attise les guerres d’influence afin d’obtenir l’organisation du Mondial. C’est la même passion qui en fixe les limites : le 15 juillet, la Coupe du monde ne sera plus celle de Vladimir Poutine, mais celle des artistes du ballon rond, les acteurs de cette fête mondialisée.
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